1983 est une année phare pour le maître de l'animation japonaise, Hayao Miyazaki. Alors qu'il n'est pas loin de concrétiser son projet de fonder le studio Ghibli, il réalise en parallèle de son manga Nausicaa un somptueux récit illustré, ou emonogatari : Le Voyage de Shuna.
Inconnu sur nos vertes contrées, ce récit fraîchement réédité chez Sarbacane en novembre 2023 est pourtant riche de tous les éléments qui constitue la mythologie myazakienne, préfigurant même certains de ses films à venir.
D'emblée, et comme dans Nausicaa, Hayao Miyazaki efface les repères temporels en situant son action entre passé et futur, sur ce que l'on suppose être notre ancien chez-nous. Aride et dévastée, contraignant, comme dans Nausicaa, l'humanité à se reclure dans des bastions, cette planète n'offre plus autant d'abondance qu'à une époque.
Quant au genre humain, ne sachant plus produire des graines réensemencables, il est condamné à se satisfaire de celles offertes par d'étranges êtres divins. Mais un jeune prince venu d'Hiwabié, désireux de changer son destin et celui de son peuple, se lance dans un long périple afin de trouver l'une de ces graines.
Au travers de court récit, résultat d'un projet d'animation avorté, Miyzaki raconte pourtant énormément en diluant les éléments clés de son génie. Une douce palette d'aquarelle donne vie à un univers mêlant, comme toujours avec Hayao, divin et humain au travers d'une lutte pour la nature.
La découverte progressive de l'univers à travers le regard de Shuna est ici couplé aux dires du narrateur, renforçant l'aspect conte et l'aura poétique de cet univers aux couleurs chamarrées, gorgé de fantastique et de beauté. Les thématiques mêlent savamment récit initiatique et quête d'une humanité perdue, dans un final mystique comme seul Hayao en a le secret.
L'édition proposé par Sarbacane permet de donner un second souffle à ce récit majeur de Miyazaki sur nos vertes contrées, et on lui espère un trajet aussi agréable que celui de Shuna.