Je ne sais pas si c'est parce que je deviens trop vieux ou bien parce que la qualité des films d'animation périclite (probablement un peu des deux mais surtout la deuxième hypothèse) mais cette Nuit d'Orion est très loin de m'avoir vendu du rêve.
Intrigué (comme tout le monde) par la présence de Charlie Kaufman à l'écriture, je m'attendais à quelque chose avec plus d'aspérités et se distinguant du tout-venant animé (malgré le nom du studio producteur), une sorte d'Anomalisa pour enfants en somme. Mais ce que nous proposent ici Sean Charmatz et Kaufman serait plutôt à ranger du côté des désillusions et de l'ambition contrariée tant le scénario est contrecarré par le cahier de charges de Dreamworks (en un certain sens le film souffre du même mal de semi-compromission que Migration de Benjamin Renner). Le première réalisation de Sean Charmatz est aussi desservie par la fausse bonne idée de la narration méta. Dans un film d'auteur surréaliste par exemple, ce procédé narratif est efficace parce que le rythme lent du récit et les sillons brumeux de l'intrigue s'y prêtent mais dans un film supposé être un film d'aventure pour enfants ce dispositif a juste pour effet de casser l'élan aventureux et de sortir le spectateur de son immersion dans l'histoire. En outre, et c'est même peut-être une faute plus grave, ce type de narration dissolve la magie du fantastique propre au monde de l'enfance et ramène les jeunes têtes blondes à la triste réalité. J'ai conscience que l'intention initiale est de passer un message sur la parentalité, la transmission et sur la richesse de l'imagination demeurant en chacun de nous ; mais dans La Nuit d'Orion on a davantage l'impression de voir le long-métrage se tirer une balle dans le pied à répétition.
Autre souci, les personnages. Tiraillé entre un héros assez agaçant voire antipathique, un compagnon d'aventures certes dark mais sans grand charisme et des personnages secondaires qui ressemblent à des versions au rabais des protagonistes de Vice-versa, il est difficile de se prendre d'affection et d'éprouver de la tendresse ou de l'intérêt pour ce qu'on voit à l'écran (quoique j'aime bien Quiétude). Et que dire de cette animation... Je suis désolé mais à certains moments le film frise la médiocrité de l'animation française et la musique abominable ne fait que renforcer ce sentiment. Après, j'ai lu que Dreamworks avait alloué à La nuit d'Orion un budget moindre parce que ce n'était pas une œuvre destinée au grand écran... Ceci explique cela.
Dernier grief, la fin. Nul doute que ce dernier plan viendra hanter les rêves de Charlie Kaufman pour les années à venir, lui qui voue une aversion pour les dénouements un peu trop sentimentaux. En fait, je me souviens même qu'il s'était foutu de la gueule de Robert Zemeckis dans le beaucoup plus recommandable et Kaufmanien i'm thinking of ending things pour ce type de fin.
En conclusion, pour affronter ses peurs en bonne compagnie on préférera Beau Is Afraid ou, pour peut-être quelque chose de plus léger, Courage, le chien froussard. Ou encore on peut aller revoir Soul de Pete Docter qui bénéficie d'une seconde vie (dans les salles obscures cette fois-ci) à partir du 14 février.
PS : La blague avec Sommeil et le coussin est hilarante. Dommage qu'il n'y ait pas plus d'humour noir de ce type.