Fargo
8.2
Fargo

Série FX (2014)

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Saison 5

Toujours tirée d'une fausse histoire vraie et dans l'idée du film, de la saison 1 et 3 tout commence par un enlèvement.

Si la saison 2 marquait le rôle des femmes et leur condition pour un besoin d'émancipation, la saison 5 nous gratifie d'un féminisme sans complexe, ponctué régulièrement de sorties verbales cinglantes, bien senties et sans effet d'overdose, balancées frontalement par la toujours parfaite Jennifer Jason Leigh -tout comme Jean Smart apportait son lot de moments jouissifs-. Les femmes reprennent donc le premier rôle, quel que soit leur propension à la violence franche ou plus sournoise dans un environnement patriarcal où il sera question de mariage forcé, de violence faite aux femmes pendant que d'autres reprendront la main à la gestion d'affaires tout aussi peu bienveillantes.

Puis vient se greffer un melting-pot de personnages propre à l'univers mais sans l'effet punch que Hawley veille toujours à respecter. Si cette saison reprend du poil de la bête avec l'excellent Jon Hamm, tout comme la saison 1 et 3 il manquera son lot d'humour, d'ironie et de vrai décalage. Alors que dans chaque saison on aura du mal à retrouver le côté soupe au lait et pugnace de F. McDormand, ici encore, on regrette que l'agent Indira (Richa Moorjani) ne trouve pas plus de matière et s'oublie ensuite. On rajoute une sorte d'ange de la mort immortel et revanchard sans apporter de vraie plus-value fantastique, une narration classique de guerre d'un gouvernement fédéral contre un groupuscule d'extrême droite, d'agents du FBI aux ray-ban de rigueur, qui tentent difficilement de rejoindre les portraits déconnectés des policiers chers à la série. De même, certaines résolutions de personnages sont d'une grande facilité, avec une vraie faute de goût scénaristique pour le personnage de Witt Farr (Lamorne Morris) venant rejoindre la liste de ceux qui ne sont pas épargnés.

Si ce n'est Jennifer Jason Leigh et Jon Hamm des plus à l'aise dans l'univers des Fargo, le bémol viendra aussi de son actrice principale, Juno Temple et au fil des épisodes, son personnage de femme peu commode ne nous gratifiera pas de toute cette violence dont elle se dit capable et passerait aisément de son statut répétait à l'envi, de tigre, à celui de tigreau et vient encore minorer les batailles rangées attendues.

Dot en ressort comme une personne plutôt chanceuse et grandement empathique qui lui sauvera la mise, pour une morale sur les bienfaits de la famille qui ne trouve aucun écho jubilatoire. Et ce ne sera pas non plus cette injonction en filigrane de la narration œil pour œil et dent pour dent, concrétisée d'ailleurs à l'image pour l'ignorant de rigueur Gator (Joe Keery), qui nous fera oublier le côté plutôt bancal que radical de l'exercice et son mantra en fil conducteur du récit : rembourser ses dettes ou en être exonéré.

Saison 4

On pourrait presque penser à une sorte de préquel à la position bien assise à venir de la mafia italienne des De Palma, Coppola et Scorcese. La guerre des gangs selon Noah Hawley, c'est celle des Italiens et des Afro américains. L'émergence du crime organisé dans un Kansas City des années 50 délaissant la ville de Fargo, pour un seul clin d'œil lors d'une échappatoire. Comme pour ses trois saisons, le prolifique Hawley choisit d'axer son récit sur un certain nombre de personnages et de nous les rendre tous franchement sympathiques malgré leur tendance à la radicalité.
Exit les flaques de sang dans la neige, la police ou le pauvre gars embarqué contre son gré ou enchaînant les mauvaises décisions. On restera du côté des gangsters, parfois avec l'image bien fantasmée qu'ils ont eux-mêmes de leur destinée. Pas de bon ou de méchant toute proportion gardée, même si on est de tout cœur avec Loy canon, décidé à en finir avec toute forme d'esclavage. Et si certains ont émis des réserves sur Chris Rock l'acteur particulièrement à l'aise, y excelle en chef de gang, l'humour en moins.

Noah Hawley opère un changement de cap, et opte pour la question de l'immigration via ses nombreux représentants mais c'est le racisme ordinaire par son portrait des afro américains, que le créateur remet sur la table, refusant l'étiquette victime et partie prenante d'une guerre de territoire, sans en avoir vraiment les moyens.
L'intrigue sera introduite par quelques autres clans notamment juifs et irlandais se massacrant dans un joyeux ballet de mitraillettes, de ralentis et de surprise, avant de subir les foudres des latins. Et pour éviter toutes les tentations de bataille rangée avant l'heure, on échange à chaque accord, un des fils de chaque gang qui ira vivre dans la famille adverse. Comme il se doit, quelques ratés pour certains adoptés, en prise avec le sentiment d'abandon précipiteront l'échéance.

Si les acteurs sont encore choisis, (Ben Whishaw, Salvatore Esposito et Gaetano Bruno), ce sont, Jack Huston, un flic dépassé par le chagrin, aux TOC contraignants qui nous rappelle que la corruption ne peut pas faire de mal, a priori. Thimothy Olyphant, pour le clin d'œil à notre Marshall préféré de Justified, toujours intègre, confronté au peu de Foi de ses interlocuteurs, adepte de l'adage bien senti ou pas, et notre déjanté de Bored to death,Jason Schwartzman prêt à tout pour accéder au trône tant convoité de la Famiglia, qui assurent les meilleurs moments. Et alors que dans chaque saison de Fargo, les femmes sont à l'honneur, on restera un peu sur notre faim, leurs portraits n'arrivent pas à dépasser la simple représentation de caractères bien trempés, et aucune ne tenant un rôle franchement concerné. Décidément partout, c'est Jessie Buckley, et son rôle interprété tout en sourire de biais, qui donne à son personnage un aspect plus poussif que justifié, ne servant qu'à pousser encore un peu plus loin le décalage des situations.

Mais qu'on se le dise ici il n'y aura pas d'aparté divins, même l'ironie et l'humour noir sont en sourdine, et les dialogues peut-être moins incisifs, mais on se régale encore de ce dosage parfait entre réalisme et absurdité, de son suspense et de son rythme constamment soutenu pour des rebondissements tout autant surprenants qu'inattendus. Totalement immersive, comme toujours, son ambiance classieuse, ou tamisée, ses virées bucoliques, ses envolées philosophiques et ses dilemmes moraux, sans oublier la musique guillerette aux morceaux nostalgiques ou de chansons d'amour pour introduire un massacre en règle.
Fargo revu et corrigé, pour une quatrième réussite.

Le film «FARGO» nous plongeait dans le Minnesota natal des frères Coen, pour une sorte de tragédie comique avec ses protagonistes aussi fous furieux et stupides pour les uns que simples et braves pour les autres. Thriller enneigé où la mise en scène dotée de nombreux plans fixes, laissait plutôt le « champ libre » à ses acteurs tous inspirés. Sa musique qui accompagnait les décors vides et grandioses, rappelant aussi à l’extrême solitude de ses personnages. "Un vendeur de voitures endetté fait enlever son épouse par deux truands, afin de réclamer une rançon à son beau-père fortuné". Un banal fait divers, où les intrigues se croisent et finiront par se télescoper dans la pure tradition de la comédie noire, réservant ses actions sanglantes où la neige immaculée de ces grandes plaines agricoles, vient se cogner à la noirceur ambiante. S’ensuivent les situations imprévisibles et dévastatrices, pour une peinture de société corrompue par l’appât du gain, la faiblesse, les vies médiocres, la difficulté de communication et le choix de vie.

La série reprend les codes et le ton de FARGO. Noah Hawley arrive à jongler entre l’univers des Coen en apportant sa propre signature à son thriller déjanté, où le sans concession et l’absurde s’entremêlent entre discours polis, réflexions philosophiques, situations loufoques et dramatiques, fusillades énervées et apartés surréels, qui interviennent en filigrane de l’intrigue sans queue ni tête, mais qui s’intègre parfaitement à l’ambiance pour sa touche originale. De petites villes tranquilles où rien ne se passe et où malgré la bonne volonté de certains, tout restera hors contrôle...Des situations bien menées pour une écriture maîtrisée et une cohérence de bout en bout en font un vrai plaisir visuel...Excessif et pourtant jubilatoire que l'on retrouve particulièrement sur les deux premières saisons..

Saison 3

Dans le même ton que les deux précédentes. Une mise en scène énergique, des sauts dans le passé et quelques split screen, de l’animation qui arrive comme un cheveu sur la soupe mais révèle toute la richesse créatrice de l'auteur, tout comme quelques envolées à tendance "fantastique"...des phrases bien senties, une belle photo, et une BO encore excellente fort bien choisie et à-propos. Pour ceux qui connaissent les instrumentaux de «Pierre et le loup» fabuleux morceaux, ceux-ci sont intégrés pour nous brosser les personnages. Choix judicieux.
Et l’auteur, Noah Hawley nous offre quelques belles scènes, jeux de caméras et autres flaques de sang dans la neige, effets artistiques toujours si bien venus ! de multiples clins d’œil à la filmographie des frères Coen (The big Lebowski pour exemple).

Toujours cette ambiance mortifère, une femme flic perspicace, des collègues stupides ou obtus, quiproquos et situations croisées reviennent pour un suspense et des rebondissements bien menés et toujours axés sur l’absurdité.
On saisi vite le délire de ces hommes toujours prêts à commettre l’irréparable par un summum de stupidité qui finira bien par les rattraper.

2010, Minnesota.
Deux frères jumeaux Ray, officier de probation et Emmit directeur d'entreprise, bien dans ses baskets, vont s’embourber dans une situation inextricable.
Dans l’idée du premier, l’enlèvement d’une épouse pour toucher une rançon, Ray, le loser, enverra un autre loser, un tantinet bourré pour mener à bien une action déjà franchement peu inspirée. Tout ceci à cause d’un héritage, source de la bataille des deux frères. Ray se sent floué, soutenue par une «escroqueuse» qui se révèlera pleine de ressources et guerrière, poursuit sans relâche son frère et celui-ci, homme d’affaires "affairé", sera lui en prise avec de fortes manipulations financières imposées... par une mafia pour le moins opaque.

La performance de  Ewan McGregor est assez étonnante.
­David Thewlis et ses dialogues excessivement redondants jouant sur l’excès, se révèlent lassants. Ils ne viennent plus s’interposaient par petites touches comme lors des deux précédentes saisons ce qui en faisait tout le charme et renvoie au personnage tenu en première saison par B.B.Thornton, mieux dosé et donc plus jubilatoire.
Carrie Coon et son personnage pourtant récurrent de l'univers «Fargo», perd en présence, décalage et force de caractère. Dommage.
Un coup de cœur par contre pour Mark Forward, Michael Stuhlbarg homme fidèle et dépassé, Shea Whigham en supérieur que ni rien ni personne ne viendra remettre en question et pour une collègue qui pour le coup se rapproche bien plus de F.Mac Dormand ou tout au moins du personnage policier féminin auquel on aurait pu s'attendre.

Cette saison reprend aussi quelques points de la seconde, notamment sur ces tueurs en binôme et déjantés, malheureusement là où la première se focalisée sur la famille, la seconde sur la société, celle-ci en oublie de donner de la réflexion. A partir de l'épisode 6 l'ambiance se resserre et l'intrigue devient prenante.

Léger bémol pour cette saison, mais toujours une belle maîtrise de l'univers "Fargo".

Saison 2

Sorte de préquel à la première, est une franche réussite.
Elle débute en 1979 à Sioux Falls dans le Dakota du Sud pour des événements antérieurs à la première saison. Une guerre des gangs entre la famille Gerhardt et l’organisation mafieuse de Kansas City venue discuter d'un projet d'expansion au Dakota du Nord. Contrairement à la première saison, plus de personnages principaux, mieux approfondis, plus d'humour noir et d'ironie. Un rythme soutenu, du suspense, des rebondissements et des intrigues multi-parties.

Une guerre des gangs genre western moderne, un montage fait de split screen rappelant bien les années 70 où se croisent les scènes qui apportent la résolution au fil de l’intrigue, secoue la temporalité, et contribue à donner du corps à l’intrigue. Le calme relatif accentuant la violence des échanges, rend la tension encore plus palpable.

Noah Hawley en profite pour décrire lui aussi une Amérique qui laisse ses marques. Que ce soit la guerre du Vietnam, la place des femmes, les vies médiocre et ses conséquences, les minorités ethniques, par des dialogues et mise en scène à tiroirs. Tout s’emboîte et sert les situations en nous baladant entre ironie et résolutions implacables, distillant tranquillement son suspense, même si...

Entre lenteur et brutalité, drôlerie et drame, on est pris dans le tourbillon. Une musique encore excellente, un générique revu à chaque début d’épisodes mais pour le même leitmotiv : "Tiré d’une histoire vraie"“ pour nous rappeler que la réalité dépasse la fiction... et que le metteur en scène s'amuse.

Des acteurs au diapason. Ted Dawson et son humour pince-sans-rire et Patrick Wilson, assurent de belles performances toute en finesse. Kirsten Dunst pour d’excellents moments de réflexion, femme « dérangée » ou femme incomprise, qui souhaite s’affranchir du rôle qu’on lui inflige ?
Cet aspect là est une réussite, mettant aussi en valeur les trois autres femmes de la série Jean Smart, Rachel keller et Cristin Milloti toutes à leur manière, luttant pour leurs survies.

Saison 1

Autant la première saison m’a parue un peu bancale, rappelant le thème du film et quelques personnages mis en valeur  Lester Nygaard (Martin Freeman), Lorne Malvo (Billy Bob Thornton), Molly Solverson (Allison Tolman) et Gus Grimly (Colin Hanks). Une enquête sur une série de meurtres et la rencontre entre Nygaard et Malvo, qui va créer un enchaînement d’événements sanglants. Les actes de Nygaard-éléments déclencheurs de catastrophes supplémentaires pris d’un excès de confiance- et un Billy Bob Thornton en grande forme, entre contrats, intervention non programmée et espièglerie pour un tueur à gages souriant et retors. Des affreux personnages tous attachants dans leur délire

Mais on a du mal à retrouver l’ambiance décalée et les dialogues percutants et humoristiques qui faisaient toute l’originalité du film, des longueurs et des caractérisations de personnages un peu faiblardes. F. McDormand recelait bien plus de subtilité de langage - si l'on doit faire le rapport entre le film et la série (?). Entre vie de famille et opiniâtreté professionnelle, douceur et pugnacité, ses dialogues à l’économie mais à l’efficacité certaine nous faisaient souffler et apprécier cette vie au ralenti. Les personnages du commissariat étaient bien plus déconnectés de la réalité, pour n'avoir ici que le chef de brigade Odenkirk, et ses quelques bonnes paroles.
Rappelant à la fois l’ambiance froide et vide du film, quelques dialogues jouissifs et des fusillades contrebalançant la lenteur de la narration, la saison 1 reste malgré tout dans l’entre-deux par des défauts de rythme. La musique contribue à une certaine réussite et s’intègre parfaitement à toutes les situations. Quelques belles scènes, notamment celle dans ce brouillard pour une poursuite croisée, la lumière, les couleurs bleutées dans ce coin glacial bien rendu, ou encore les apartés "divins" qui apportent le décalage permettent d’avoir une série policière de bonne facture.

limma
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Le 21 mars 2017

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